Je me suis accroupie sous le gros bureau de chêne qui capte tout le lumière matinale de cette petite fenêtre, sur cette mezzanine. J'esperais y trouver un câble débranché, une poussière d'espoir, une ouverture sur Vénus. Un moyen de donner corps à un Travail Personnel encadré un peu trop personnel à mon goût. Rien de tout cela, pourtant elle est survenue. Sans que je n'ai rien pu faire. Sans générique nostalgique ni fumée de détresse, elle m'a traversée de haut en bas. Et, il faut dire qu'elle avait une force imcomparable pour conquerir mes un mètre soixante-quinze. Du haut en bas en commençant par mes narines, en asfixiant mon coeur d'un souvenir dévastateur, en crispant mes orteil sur le parquet gelé. Quand elle a eu finit sa route , avec l'assurance que je ne l'avais jamais oublié, elle s'est envolée. Et deux glaçons ont fondus sous mes paupières. Si je vous dis qu'il existe des senteurs d'étoiles, vous me croyez à présent?
Quelques clics, droits ou gauches, qu'importe et elle est apparue. Elle, c'est alors cette photographie. Je suppose que vous n'apercevez là qu'une jeune fillle perdue dans son monde qui s'accroche à un manche de guitare, et gratte ses cordes du bout de ses doigts un peu trop courts. En arrière plan, une chambre, peu ordonnée, d'artiste passionné, débousolé. Et moi? Je l'admire, je le regrette. Il était fin et solide à la fois, sombre et plein de reflets mysterieux. Il m'enveloppait si légèrement ,sans jamais se laisser tomber. La pluie lui donnait cette odeur suave qui, à elle seule me rassurait. C'était Lui. Lui pour moi, sans bémol. Il était le plus cadeau qu'on m'avait fait. Je ne vois que lui, à mon poignet gauche. Une attache en cuir qui, un jour s'est brisée. Par l'usure, par le temps? Car on ne voit bien qu'avec le coeur, c'est un petit blond portant une grande cape verte qui, un soir de mon enfance, est venu me le chuchoter à l'oreille. Est-ce que j'aurai le courage, un jour, de voir sur cette image un verni à ongle rouge, un chapeau melon, une veste froissée?